(retour) sur l'expo Maillol à la Piscine de Roubaix
- Eric Valenne
- 1 nov.
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 4 jours
L'expo La Quête de l’Harmonie d’Aristide Maillol est terminée mais se revit grâce ) la vidéo
Aristide Maillol (1861–1944) est devenu célèbre pour ses sculptures monumentales et féminines aux formes généreuses. Mais avant d’exceller dans cette discipline, l’artiste de Banyuls avait déjà brillamment prouvé ses qualités dans une multitude d’arts décoratifs. Monté à paris à 21 ans et inscrit à l'école nationale des beaux-arts, ses débuts et son parcours artistique n’y ont pas été des plus faciles ni linéaires. La ville lumière lui a laissé d’emblée quelques déboires autant académiques que personnels et financiers. Mais c’est notamment au cours de dessin de nus d’Adolphe Yvon qu’il fit la rencontre d’Achille Laugé et d’Antoine Bourdelle qui vont l’aider et le motiver. Sa première exposition au Salon de 1890 engendrera sa rencontre avec le groupe des Nabis. Puis sa peinture influencée par ses contemporains comme Pierre Puvis de Chavannes lui permettra de rencontrer Bonnard, Vuillard et Maurice Denis, puis Paul Gauguin en 1892.
Ebahi par les tapisseries de La Dame à la licorne au musée de Cluny, Maillol décida d’ouvrir un atelier de tissage de retour à Banyuls. Il est raconté que laissant œuvrer ses ouvrières pendant l’impression de ses tapisseries, il se serait mis à tailler des blocs de bois… Une révélation qui allait petit à petit le mener vers la sculpture et le travail de la pierre. Une discipline qui débutera dans la trentaine mais le mènera jusqu’au bout de sa vie. Nous sommes à la fin du 19ème siècle et le voilà embarqué vers sa nouvelle passion autant que destin. Croquis, épures et modelages en terre vont donner vie à des baigneuses, des Vénus, des femmes introverties, songeuses, debout ou accroupies. Toutes évoquent la statuaire grecque archaïque, évoquant quelque allégorie géographique ou féminine.
Bientôt, la perfection des formes d’une Léda va impressionner Rodin lui-même. C’est également dans son atelier qu’il rencontrera Clotilde Narcis qui fut sa compagne et son premier modèle en sculpture. Avec cet art, Aristide Maillol a découvert sa véritable vocation pour s’y imposer comme artiste de premier plan. Parmi ces œuvres exposées à la Piscine, quelques-unes furent déjà repérées par ses contemporains qu’ils fussent écrivains comme Octave Mirbeau ou André Gide mais également artistes comme Ambroise Vollard, les frères Bernheim, Eugène Druet, Gustave Fayet.
Grâce à des prêts exceptionnels venant de tous les horizons, l’expo « en quête de l’harmonie » de Maillol y laisse admirer le travail de l’artiste dans sa plus grande diversité, évoquant des réalisations d’avant la création des grandes sculptures qu’on lui connaît. De ce fait, l’exposition déroule l’ensemble de sa carrière avec des passages et des allers-retours entre croquis et céramique, broderie et tapisserie, dessin et gravure. Autant d’œuvres qui ont tracé le chemin qui le mènera vers la sculpture. Sculpture sur pierre marbre ou pierre calcaire qu’il préférait et son absence de reflets. Comme pour laisser seul la sculpture et la lumière briller pour elles-mêmes sans reflets extérieurs.
Exécutée pour le comte Harry Kessler (comme le seront plus tard les sculptures du Cycliste et du Désir), la première œuvre conséquente de Maillol fut appelée Méditerranée. Elle fut exposée au Salon d’automne de 1905 où elle s’est imposée dans tous les sens du terme. Dans un corps féminin (presque toujours), l’anatomie puissante et charpentée mais sensuelle se suffisait à elle-même. C’est ce que l’on aperçoit en observant les formes simples de ces corps massifs et imposants mais toujours empreints de grâce. Des corps parfois proches de la géométrie. Autour du Monument à Cézanne, un groupe des Nymphes de la prairie et de la Montagne fut commandé pour l’exposition de 1937 et sert de point d’honneur à ce parcours artistique.
Installé à Marly près de Paris en 1903, la chance et la célébrité vont aider Maillol à travailler sans relâche grâce notamment au mécénat du comte Harry Kessler, collectionneur allemand qui lui commandera une « Méditerranée » en pierre après quelques bronzes et marbres, dont s’extasiait André Gide. Petit à petit, commandes privées et publiques se sont enchaînées avec par exemple le monument à Louis-Auguste Blanqui (homme politique révolutionnaire), Action enchaînée puis autres nus féminins qui vont d’ailleurs souvent déchaîner haines et passions. Puis viendront encore d’autres sculptures grandeur nature : Pomone, Flore, L’Été, Le Printemps… Après avoir eu comme modèle Clotilde Narcis, ce sera ensuite à Dina Vierny, une jeune fille aux formes épanouies et modèle connu, de jouer le rôle de muse pendant dix ans et d’incarner dans la pierre blanche le rôle sculptural et silencieux de quelques sculptures monumentales comme La Montagne en 1937.
L’œuvre d’Aristide Maillol incarne des formes puissantes et massives qui indiquent un grand classicisme imposé par l’artiste. Mais regardent déjà vers les confins de l’abstraction, laissant à « Rodin l’expressionniste » les sentiments à lire sur les visages et les postures. Ici, les attitudes sont comme introverties, détachées du monde, plus allégoriques, incarnant des univers comme Méditerranée, la Rivière)
Avec Rodin avec qui fut à l’époque, ou est encore, souvent comparé ou opposé, Maillol fut considéré comme le plus grand sculpteur français après la mort de ce dernier en 1917.

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